Un peu de rose, un peu de vent, un peu de rêves, un peu d'absence, un peu de vous...un peu de moi.

dimanche 30 septembre 2012

Obstacle

 


 Oo.Music.oO




      Depuis combien de temps il roule? Il ne sait plus... Il n'a pas de montre. Le temps c'est pour les autres, ceux qui ont un but, une quête. Aller d'un point A à un point B dans l'ordre du temps imparti.
Lui il erre. Il ne sait pas quand il arrivera à destination ni finalement qu'elle était cette dernière.
Au milieu de nulle part, entouré d'arbres sereins, la route se dessine telle un bras géant lui indiquant une direction. Juste le bruit du moteur...
Il s'aperçoit de la beauté du ciel obscur de ce début de nuit, de ce vide étrange que crée le manque de gens autour de soit.

-"Ce silence... Est-ce bien naturel?"

Et puis il y a ce point blanc pur, irradiant, chaleureux... Fixe.
Un œil bienveillant, rond mais tout aussi intransigeant.

-"Quelle heure peut-il bien être?"

Il avait oublié que la Lune était si belle. Qu'elle l'a toujours été et qu'une chose est sûre c'est qu'elle le sera encore longtemps... Il l'espère!
Bien après sa mort et celle de ses petits enfants.

-"Pourvue qu'elle perdure là où rien ne dure."

Il se gare, éteint le moteur. Le début de l'automne est déjà plus que perceptible. L'odeur a changée, même l'obscurité de la nuit est différente.  Le froid mord un peu plus profondément les chairs à l'air.
Le cuir du volant entre ses mains soudain il se souvient... Il s'en rappelle.
C'est à cause d'elle.
Elle lui avait dit d'écrire, qu'elle aimait ses mots, ses mains et sa peau. Qu'il était beau.
Elle lui a dit aussi que sans lui elle ne pourrait plus vivre, elle lui avait promis pourtant...

Et pourtant... D'elle il ne restait que son foulard bleu œillet qu'elle avait achetée un mercredi matin au marché à une vieille dame.
Il était posé sur là.. sur le siège passager à la place du mort.

-"Si je le sens, je la sentirais elle..."

Il n'avait jamais aimé cette couleur, il ne trouvait pas que ça lui correspondait.
"Ça ne va pas avec ton teint."

Elle l'avait oubliée avant de descendre.
Il se souvient des cris, de ses larmes et ses insultes. De son rymel noir qui lui tranchait les yeux.

-"C'est vrai qu'elle est belle quand elle pleure!"

Il se souvient de la porte qui avait claquée, des gens interloqués par la scène qui les regardaient, de sa gêne à ce moment là.

Et puis c'est tout, ça s'arrête là, c'est le noir, il ne sait plus la suite. L'a t-il véritablement connu? Vécue?
C'est flou...Et puis après tout il s'en fout.
Il savait que ça finirait de cette façon. Il savait qu'il ne comprendrait pas et qu'il ne se souviendrait plus.
Il est comme le papillon qui ne sait plus que sa vie est trop courte.
Comme le poisson qui ne sait pas que l'air l'asphyxie.

Il tourne les clefs... Ronronnements rassurants du moteur.

La pédale est au plancher, le platane est embrassé.
Quelques gouttes de pluie fines s'écrasent sur le pare-brise... De l'autre côté du verre, le sang lourd et tiède se répand sur le volant.

-"Je savais que j'avais un but..."